Vaches et éoliennes industrielles
Vaches et éoliennes industrielles

En Loire-Atlantique, l’éleveur laitier Fabien Pineau, 29 ans, tire la sonnette d’alarme. Ses vaches sont malades et la production laitière est en chute depuis les travaux de fondation des six éoliennes du parc du Haut-Vignoble, à la Remaudière.

Négociations à l’amiable ?

Durant six mois, Fabien Pineau a cru aux bienfaits d’une négociation à l’amiable, dans la discrétion des échanges menés avec la chambre d’agriculture des Pays de la Loire, le promoteur éolien Energieteam et le distributeur d’électricité Enedis. L’éleveur a attendu, mais n’a rien vu venir tandis que l’état de santé de ses vaches se dégradait. « Je ne peux plus rester silencieux ». 

Après la mise sous tension du parc trois vaches décèdent

 Au printemps 2023, les fondations du parc éolien sont coulées à moins d’un kilomètre de la ferme et le câblage électrique souterrain est déroulé. « Dès juin, la production laitière chute. Mes vaches refusent d’aller à la traite. Je suis obligé de les pousser ». Les journées de travail s’allongent, jusqu’à cinq heures de plus par jour, « surtout cet hiver ». Les problèmes sanitaires n’ont pas de causes évidentes et les traitements sur les animaux malades sont sans effet. « Les vaches font des mammites à répétition. Les problèmes de boiterie se multiplient et la croissance des jeunes est ralentie ». Après la mise sous tension du parc en février 2024, trois vaches décèdent, « dont deux en quinze jours, juste après le vêlage ». La perte économique de l’exploitation approche les 100 000 €. Fabien Pineau réclame l’arrêt du parc afin d’observer l’évolution du troupeau. Le 8 juillet, sa demande a été conditionnée à l’activation d’un GPSE(1). « Si j’accepte, je signe mon arrêt de mort ! La vérité doit éclater sans passer par ces stratégies destructrices du monde agricole ! », tempête le jeune éleveur, en contact avec plusieurs agriculteurs de Loire-Atlantique en grande difficulté depuis la construction de parcs éoliens près de leurs exploitations.

(1) GPSE :  Groupe permanent pour la sécurité électrique dans les élevages,  dont le fonctionnement et les expertises sont financés par les différents opérateurs électriques français.

Pour en savoir plus :
https://actu.fr/pays-de-la-loire/la-remaudiere_44141/dans-cette-ferme-de-loire-atlantique-des-vaches-tombent-malades-depuis-larrivee-du-parc-eolien_61542069.html

« Quatre mortalités en un an »

L’arrivée de ces faits est concomitante à l’installation du parc éolien voisin, à 800 mètres de là. La ferme familiale de 112 ha et 65 vaches laitières, exploitée depuis des décennies, n’avait connu aucun souci, jusqu’en 2023.

Mais depuis l’an dernier, l’exploitation enregistre des baisses régulières de production et des maladies à répétition (mammites, boiteries) dans le troupeau.

« En un an, on en est même à quatre mortalités », déplore Fabien Pineau.

Des autopsies sur les vaches mortes ont été réalisées par les services vétérinaires.

Présence de fissures terrestres et de veines d’eau

La ferme passe de 160 traites à 120 traites par jour, « sachant que je poussais 40 vaches par jour au robot », poursuit-il.

Dans l’incompréhension, l’agriculteur fait appel à un géobiologue de la Chambre d’agriculture de Loire-Atlantique en janvier 2024. L’objectif est la recherche de risques externes. Comme la présence de courants parasites qui peuvent provoquer des dysfonctionnements dans les élevages, du fait de la très forte sensibilité des vaches.

Peu de choses sont trouvées lors des contrôles sur les terres et les installations électriques, si ce n’est la présence de fissures terrestres sous le bâtiment ainsi que des veines d’eau. Des corrections sont apportées autour de l’exploitation sur les failles d’eau.

« Dès le lendemain, la ferme enregistrait 160 passages à la traite par jour. La situation était comme à la normale, sans besoin de pousser les vaches ».

« Tout a rechuté, c’est le fiasco »

Cette bonne production va durer trois semaines, jusqu’à fin février 2024. « Période où le parc éolien est entré en production », pointe Fabien Pineau. L’agriculteur fait alors « le lien » entre les affections de son troupeau et la mise en action des six éoliennes situées à 800 mètres de l’exploitation.

«  Il y a un problème qui n’était pas là avant le parc éolien »

Adjoint à La Remaudière, Hervé Cremet accompagne Fabien Pineau, depuis le mois de mars. «  C’est quelqu’un d’intelligent, qui a la tête sur les épaules. J’ai pris le temps de l’écouter, de regarder les documents et de me renseigner. Quand un agriculteur est en souffrance, mon rôle d’élu est de l’accompagner et de l’aider dans ses démarches. C’est logique  », commente l’élu qui, six mois plus tard, est toujours aux côtés de l’éleveur.

«  Ce que je constate dans ce dossier, c’est qu’il y a un lien de corrélation entre un élément extérieur et un problème qui n’était pas là avant le parc éolien  », poursuit-il.

«  Ce n’est pas mon avis. Je me base sur des faits  », martèle l’élu, qui déplore «  l’absence du côté humain  » dans cette affaire.

Au gré de ses recherches, l’élu a trouvé d’autres cas similaires à la ferme de la Borderie

«  On retrouve les mêmes problèmes, mot pour mot. C’est le cas dans des exploitations en Ille-et-Vilaine et en Loire-Atlantique  », explique Hervé Cremet qui a interpellé la préfecture sur le cas du Gaec de la Borderie.

«  La loi est ainsi faite. Il faut arriver à prouver scientifiquement les choses  », dit-il.

«  Qu’est-ce que l’on fait de toutes ces victimes collatérales du développement éolien  », déplore Hervé Cremet.

Au regard du nombre d’installations, «  ces cas-là sont des gouttes d’eau. Pourquoi n’arrive-t-on pas à trouver des solutions en mettant en place par exemple un fonds d’indemnisation à chaque implantation de parc ?  », cite en exemple l’élu.

L’adjoint propose aussi de négocier dans les contrats d’exploitation des arrêts de parc en cas de problème. «  Cela évitera bien des études, des soucis et des pertes d’argent  », indique l’élu qui a commencé à nouer des contacts pour remonter les propositions au niveau national.

Vu les enjeux et la complexité du sujet, le travail ne fait que commencer.

Categories:

Vous avez un avis ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *