Bernard GUILLOT avec Rémi CHAMPOMIER, Publié le 21/04/2021 – Le Progrès
La principale des trois sources qui alimentaient l’un des puits du couvent s’est arrêtée de couler en 2017. A la même période, les fondations des éoliennes de Chamole sortaient de terre. Les religieuses font le lien entre les deux évènements. Mais le développeur éolien Enercon réfute cette hypothèse.
« Nous ne cherchons pas réparation, annonce d’emblée mère Claire-Elisabeth, responsable du couvent des Clarisses . Mais il faut que tout le monde sache ce qui s’est passé. » L’affaire date de plusieurs années, en 2017, alors que les entreprises injectent du béton dans les calcaires du plateau pour assurer les fondations des éoliennes de Chamole.
« Trois semaines plus tôt, nous avions pu procéder sans problème au lavage de la cour. »
« C’est à la même période que la pompe du puits a refusé de s’amorcer, par manque d’eau. Et pourtant trois semaines plus tôt, le 6 mars, nous avions pu procéder sans problème au lavage de la cour. Un puisatier appelé sur place a constaté que la plus importante des trois sources était tarie. Le lien de cause à effet entre l’injection du béton et la déviation d’une arrivée d’eau nous paraît assez évident. D’autant que les éoliennes ont englouti beaucoup de béton. » Ce témoignage tardif a été recueilli par Le Progrès avec l’intermédiaire d’un membre de l’Association pour la préservation du patrimoine environnemental (Appel), qui milite contre l’extension du parc éolien. Y a-t-il un rapport?
La société Enercon, responsable de l’implantation des éoliennes, précise que les machines sont situées à sept kilomètres du couvent par la route avec un dénivelé de 500 mètres. « Pour nous, il n’y a aucun lien de cause à effet établi, on pourrait tout aussi bien se pencher sur les travaux de voiries effectués juste à côté du couvent à la même période… », répond Pierre-Alexis Levier, pour la société allemande.
Les négociations avec Enercon volent en éclat
Les sœurs Clarisses ont pris contact dès 2017 avec Enercon, qui a délégué un responsable sur place. Si la discussion a été très courtoise, « il n’y a pas eu reconnaissance de responsabilité, raconte la mère abbesse. Mais la société acceptait de payer la moitié des travaux de nettoyage, de réparation de la pompe et de l’installation d’une ampoule d’ultraviolets pour assainir l’eau. Mais en évitant d’ébruiter l’affaire. »
Le son de cloche est tout autre du côté d’Enercon: « C’est totalement faux, jamais il n’a été question d’imposer quoi que ce soit !» Pierre-Alexis Levier tient à s’expliquer : « Les sœurs nous ont contactés via un intermédiaire, nous avons été sensibles à leur situation et avons voulu donner un coup de main en toute transparence. Des négociations se sont engagées, tout était prêt, et du jour au lendemain, l’accord a volé en éclats. »
La société assure que le contact est rompu depuis au moins deux ans. «Mais encore aujourd’hui, il n’y a pas d’obstacles à les aider comme c’était prévu.» La mère Claire-Elisabeth a sa propre interprétation de la situation : « Par rapport au préjudice irréversible que nous avons connu, cela nous a semblé injuste. Nous avons donc refusé les 3 au 4 ooo €. Nous avons préféré garder la richesse du pauvre qu’est la liberté. Nous n’avions pas les moyens d’effectuer un traçage de l’eau avec des méthodes de colorations ou d’aller en justice.»
Contact: clarisses.poligny@gmail.com
Le puits de sainte Colette
Situé sous les ruines du château de Grimont, le monastère Sainte-Colette a été bâti en 1415 par Colette de Corbie, réformatrice de l’ordre des Clarisses (ou ordre des pauvres dames) sur les caves données par Jean Sans Peur. La qualité de son architecture, la beauté de ses jardins, l’harmonie de l’ensemble l’ont fait classer au titre des monuments historiques, y compris les sols et vestiges archéologiques. Le puits, situé tout près de l’entrée, est considéré par les croyants comme un « puits miracle» : Sainte Colette l’avait fait creuser alors que personne ne croyait à la présence de cette eau. Mondialement connu, il est considéré comme une source miraculeuse en particulier contre la stérilité et n’avait depuis lors jamais été tari. Les reliques de Sainte Colette sont conservées dans une châsse située dans la chapelle.
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